Introduction
Pr Jean-Pierre Riveline et Pr Emmanuel Cosson (coordinateurs de SFDT1)
La cohorte française SFDT1 (1, 2) a pour objectif principal d’évaluer le surrisque cardiovasculaire chez des personnes vivant avec un diabète de type 1. Aujourd’hui, 4 ans après la première inclusion, 3 700 patients suivis dans 65 centres participent à cette aventure. De nouveaux centres nous ont récemment rejoints et les inclusions s’intensifient. Plusieurs analyses ont déjà été effectuées à partir des multiples informations cliniques ou biologiques disponibles sur cette cohorte et de nombreux projets, validés par le conseil scientifique de SFDT1, sont en gestation.
Les chercheurs impliqués dans ce projet ont été invités par l’épidémiologiste référent de SFDT1, le Dr Guy Fagherazzi, au Luxembourg Institut of Health (LIH) pendant 2 jours de sessions scientifiques, afin de faire un point sur l’avancée de ces travaux et imaginer l’avenir de cette cohorte.
Nous remercions les sponsors de ce work-shop : Abbott, Lilly et Sanofi ainsi que les soutiens de la cohorte : Abbott, Lilly, Air Liquide, Sanofi, Novo Nordisk, Insulet, Dexcom, Medtronic, Yspomed et LifeScan.
En savoir plus sur la cohorte SFDT1 : sfdt1.fr.
1. Riveline JP, Vergès B, Detournay B et al. Design of a prospective, longitudinal cohort of people living with type 1 diabetes exploring factors associated with the residual cardiovascular risk and other diabetes-related complications: The SFDT1 study. Diabetes Metab 2022 ; 48 : 101306.
2. Riveline JP, Sablone L, Cosson E. SFDT1, une cohorte française de suivi de personnes vivant avec un diabète de type 1 Med Mal Metab 2021 ; 15 : 380-6.
Troubles musculosquelettiques au cours du diabète de type 1 dans l’étude SFDT1
Dr Sylvie Picard
Quel est le propos de votre étude ?
Mon thème de recherche est représenté par les troubles musculo-squelettiques (TMS) dans le diabète de type 1 (DT1). Il s’agit de montrer que les TMS représentent une complication fréquente du DT1, largement sous-étudiée, sous-estimée, mais avec des conséquences pourtant importantes.
Troubles musculosquelettiques et diabète de type 1
Les TMS au cours du DT1 sont représentés par des fractures liées à une fragilité osseuse excessive, mais aussi par des tendinites, des syndromes rétractiles touchant les membres supérieurs (capsulite rétractile d’épaule, maladie de Dupuytren) et des syndromes canalaires avec compression de tendons (doigt à ressaut, ténosynovite de De Quervain) ou avec compression de nerfs essentiellement au niveau des membres supérieurs (syndrome du canal carpien, compression du nerf ulnaire au coude), mais aussi parfois au niveau du pied (névrome de Morton).
Épidémiologie et conséquences
Ces TMS existent aussi bien sûr dans la population générale, mais, au cours du DT1, ils sont beaucoup plus fréquents (2 à 10 fois), ils surviennent chez des personnes plus jeunes et surtout ils sont très souvent multiples (dans environ la moitié des cas). Ils induisent des douleurs et/ou des troubles de la mobilité ou de la force et, de ce fait, ils sont à l’origine d’une diminution de la qualité de vie. Ils interfèrent aussi bien avec la vie quotidienne (cuisiner, manger, porter, conduire…) et les loisirs (artistiques, sportifs) qu’avec la vie professionnelle avec souvent nécessité d’arrêts de travail répétés et/ou prolongés ; parfois ils obligent même à une reconversion professionnelle, voire à une mise en invalidité.
Troubles musculosquelettiques et technologie
Et, chez les personnes vivant avec un DT1, les TMS peuvent également interférer avec les soins quotidiens indispensables à la gestion du DT1 : les gestes nécessaires pour insérer un capteur (ou faire une glycémie capillaire), remplir un réservoir de pompe et insérer un cathéter (ou faire une injection au stylo) peuvent devenir très difficiles en cas de diminution de la mobilité, de la force et/ou de la dextérité. Nos premières études rétrospectives, il y a quelques années, montraient que les personnes avec DT1 et TMS semblaient utiliser moins souvent les nouvelles technologies que celles sans TMS (1).
Troubles musculosquelettiques et complications
Ces études suggéraient également que les personnes avec TMS avaient davantage de complications microangiopathiques et éventuellement cardiovasculaires du diabète et que la prévalence de complications était encore plus élevée en cas de TMS multiples.
La cohorte SFDT1 est une magnifique opportunité de vérifier au cours d’une étude prospective sur un très grand nombre de personnes avec DT1 si nous retrouvons ces résultats. Cela va également permettre de préciser les déterminants des TMS. Il s’agit de la première étude prospective sur ce thème d’une telle ampleur.
À quels résultats vous attendez-vous ?
Tout d’abord nous pensons confirmer la prévalence élevée des TMS et effectivement les premiers résultats présentés aux congrès SFD 2023 et 2024 montrent, sur plus d’un millier de participants, que pratiquement un participant à l’étude SFDT1 sur trois a été ou est atteint de TMS alors que la moyenne d’âge n’est que de 40 ans. Nous avons aussi pu étudier les déterminants des TMS et les associations avec les différentes complications du diabète, mais aussi avec les paramètres AGP puisque ceux-ci sont recueillis au cours de l’étude SFDT1. Et nous avons pu vérifier si oui ou non la présence de TMS a une incidence sur l’utilisation de la technologie en sachant que celle-ci évolue également beaucoup actuellement.
Vous aurez bientôt les réponses à ces questions dans un article actuellement en cours de rédaction.
Pour tout ce travail, je tiens à remercier tout particulièrement l’équipe de Guy Fagherazzi et Gloria Aguayo au LIH (Luxembourg Institute of Health) et en particulier Noémie Topalian qui a fait tous les calculs et les études statistiques lors de son stage d’ingénieur ainsi que Dulce Canha. Un grand merci également à Emmanuel Cosson et Jean-Pierre Riveline pour leur confiance et un merci tout spécial à Dimitar Vasilevski, chirurgien orthopédique à Dijon, spécialiste de la chirurgie du pied et de la main, qui a initialement attiré mon attention sur le sujet des TMS dans le DT1 et qui a toujours accepté de répondre patiemment à mes questions en me faisant partager sa très grande expertise. Et, bien entendu, un très grand merci à tous les partenaires de l’étude SFDT1 pour leur soutien et à tous les participants à l’étude !
1. Picard S, Vasilevski D, Fagherazzi G. Troubles musculosquelettiques au cours du diabète de type 1. Med Mal Metab 2021 ; 15 : 464-70.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Connaissances nutritionnelles glucidiques et équilibre du diabète de type 1 au sein de la cohorte SFDT1
Dr Sopio Tatulashvili
Pour l’équipe du projet : Pr Emmanuel Cosson, Pr Michael Joubert, Laura Sablon, Naima Hamamouche, Hervé Servy, Dr Blueunn Dreves, Nanthara Sritharan, Dr Sopio Tatulashvili.
Quel est le propos de votre étude ?
L’objectif de notre étude est d’évaluer l’effet de l’éducation glucidique sur l’équilibre du diabète de type 1 (DT1) dans la cohorte SFDT1. Notre hypothèse est que les connaissances nutritionnelles glucidiques sont en corrélation directe avec un meilleur équilibre du diabète.
Nous évaluons le niveau de connaissance glucidique à l’aide d’un nouveau questionnaire,
GluciQuizz (www.gluciquizz.fr) (1). Le questionnaire a été développé et validé par les équipes de Caen, Strasbourg et Bobigny à partir d’un questionnaire américain AdultCarbQuizz (2).
L’étude a été piloté pour SFDT1 dans le sens où c’est la première fois qu’un questionnaire était envoyé aux participants de la cohorte via la plateforme ePRO. En plus de répondre au questionnaire Gluci-Quizz, les participants nous ont communiqué leurs données de mesure continue du glucose des deux dernières semaines. L’équilibre du diabète est principalement évalué par le temps passé dans la cible (TIR, pour Time In Range).
En environ 1 mois, nous avons obtenu 781 réponses (sur 2 323 participants interrogés), dont 687 sont éligibles pour notre étude. Les analyses principales sont en cours.
1. Tatulashvili S, Dreves B, Meyer L et al. Carbohydrate counting knowledge and ambulatory glucose profile in persons living with type 1 diabetes. Diabetes Res Clin Pract 2024 ; 210 : 111592.
2. Dreves B, Tatulashvili S, Meyer L et al. GluciQuizz : un nouvel outil validé pour évaluer les connaissances diététiques des patients vivant avec un diabète de type 1. Med Mal Metab 2024 ; 18 : 144‑7.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Inégalités cardiovasculaires hommes-femmes avec un diabète de type 1 : données du registre allemand DPV et de la cohorte française SFDT1
Pr Emmanuel Cosson
Pour l’équipe projet DPV et SFDT1 : Pr Emmanuel Cosson, Marie Auzanneau, Gloria A. Aguayo, Pr Wolfram Karges, Pr Jean-Pierre Riveline, Svenja Meyhoefer, Laura Sablone, Sebastian Propp, Dr Guy Fagherazzi, Pr Reinhard W. Holl.
Quel est le propos de votre étude ?
Jean-Pierre Riveline et moi avons rencontré pour la première fois Reinhard W. Holl le 14 septembre 2016 lors du congrès de l’EASD à Munich lorsque nous travaillions à la genèse de la cohorte SFDT1. En effet, il avait créé en 1995 un registre d’enfants vivant avec un diabète de type 1 (DT1) en Allemagne (the multicenter Prospective Diabetes Follow-up Registry ; DPV : www.d-p-v.eu) utilisé afin d’améliorer les pratiques des centres. Ce registre de plusieurs milliers de personnes s’était étendu à la population adulte en 2000. Nous nous sommes revus lors du congrès de l’ATTD en 2022 et sommes convenus de commencer un travail comparatif dont le sujet serait les différences éventuelles entre hommes et femmes dans la prise en charge du risque cardiovasculaire.
En effet, il persiste un surrisque cardiovasculaire des hommes par rapport aux femmes dans le DT1, mais celui-ci est moins marqué que dans la population générale (1, 2). Nous voulions vérifier que femmes et hommes avaient droit à une prise en charge équitable.
Où en est l’étude ?
Les premiers résultats ont été présentés lors des congrès de l’EASD 2023 puis SFD 2024 et un article est en voie de finalisation. Les données des deux études sont protégées et nous faisons des comparaisons au sein de DPV et SFDT1 séparément. Nous montrons que les femmes ont un meilleur profil cardiovasculaire que les hommes dans les deux études. Nous observons également des points d’amélioration (surtout chez les femmes) sur la prescription de statine en cas de LDL cholestérol ≥ 1,3 g/l et d’inhibiteurs du système rénine-angiotensine en cas de microalbuminurie.
Ces résultats nous ont fait considérer l’intérêt d’un benchmark de la prise en charge du risque cardiovasculaire dans SFDT1 (3) : cela pourrait améliorer la prise en charge dans les centres investigateurs dans une dynamique positive.
1. Vergès B. Cardiovascular disease in type 1 diabetes, an underestimated danger: Epidemiological and pathophysiological data. Atherosclerosis 2023 ; S0021-9150(23)00244-7.
2. Huxley RR, Peters SAE, Mishra GD, Woodward M. Risk of all-cause mortality and vascular events in women versus men with type 1 diabetes: a systematic review and meta-analysis. Lancet Diabetes Endocrinol 2015 ; 3 : 198-206.
3. Riveline JP, Vergés B, Detournay B et al. Design of a prospective, longitudinal cohort of people living with type 1 diabetes exploring factors associated with the residual cardiovascular risk and other diabetes-related complications: The SFDT1 study. Diabetes Metab 2022 ; 48 : 101306.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Particularité du sujet diabétique de type 1 en situation d’obésité : les données de la cohorte SFDT1
Dr Laurence Salle, Pr Jean-Pierre Riveline
Quel est le propos de votre étude ?
Les patients vivant avec un diabète de type 1 (DT1) sont confrontés à l’épidémie d’obésité au même titre que la population générale. En outre, malgré l’amélioration de la prise en charge au cours des
20 dernières années, le DT1 expose à un surcroît de mortalité cardiovasculaire. Un risque cardiovasculaire résiduel persiste malgré un contrôle optimal des facteurs de risque classiques. Dans le contexte d’une prévalence accrue, le rôle joué par l’obésité dans cette population apparaît comme un paramètre déterminant à étudier.
À quels résultats vous attendez-vous ?
L’objectif est de déterminer quelle est l’implication de l’obésité et du surpoids dans l’estimation du risque cardiovasculaire à 5 et 10 ans. Plus précisément, nous souhaitons comprendre le rôle joué par la résistance à l’insuline dans le risque cardiovasculaire chez le patient vivant avec un DT1.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
SFDT1 – Tabac et diabète
Pr Bruno Vergès
Quel est le propos de votre étude ?
Le tabagisme est un problème de santé publique majeur dont le retentissement au sein de la population diabétique est important. Ceci est particulièrement vrai dans le diabète de type 1 (DT1), où, d’après une large méta-analyse, le tabagisme augmente la mortalité globale de 64 % (1). Il apparaît donc important d’étudier précisément le tabagisme, chez les patients atteints de DT1, en analysant leurs profils cliniques, biologiques et socio-économiques et en évaluant les conséquences de l’intoxication tabagique sur les complications micro-angiopathiques (rétinopathie, néphropathie), neuropathiques et cardiovasculaires (coronaires, cérébro-vasculaires et artériopathie des membres inférieurs).
Où en est l’étude ?
La base de données SFDT1 est idéale pour répondre à ces objectifs. Lors du workshop SFDT1, tenu les 5 et 6 juin 2024 à Luxembourg, une présentation brève des premiers résultats de l’étude « SFDT1 – Tabac et diabète » a été effectuée avec une description des profils cliniques, biologiques et socio-économiques des patients DT1 fumeurs, anciens fumeurs et non-fumeurs.
Il est prévu prochainement de préciser, grâce aux questionnaires remplis par les patients de l‘étude SFDT1, les caractéristiques psychologiques différenciant les fumeurs des non-fumeurs.
1. Qin R, Chen T, Lou Q, Yu D. Excess risk of mortality and cardiovascular events associated with smoking among patients with diabetes: meta-analysis of observational prospective studies. Int J Cardiol 2013 ; 167 : 342-50.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Randomisation mendélienne et glycémie
Dr Claire Vandiedonck
Quel est le propos de votre étude ?
Grâce à son envergure, à sa collection d’échantillons biologiques et à son recueil complet de données cliniques de patients, la cohorte SFDT1 est une formidable ressource pour explorer de nombreuses questions sur la santé des patients avec un diabète de type 1 (DT1).
Risque glycémique et complications chroniques
Parmi ces questions, notre projet s’intéresse au risque de complications chroniques. En effet, malgré les progrès thérapeutiques de ces dernières années, notamment avec le monitorage continu du glucose, les patients peuvent encore souffrir de dérégulation glycémique importante. Or notre hypothèse de travail est que le “risque glycémique” serait responsable des complications chroniques du DT1, tant micro- que macrovasculaires.
Il a été établi depuis de nombreuses années qu’un mauvais contrôle de la glycémie, mesurée par l’HbA1c, a un rôle causal dans les complications microvasculaires. De plus, une association a été trouvée avec le risque macrovasculaire sans que la causalité soit démontrée. Il est désormais également important d’établir la pertinence des mesures continues du glucose et d’en évaluer le rôle causal dans l’apparition de complications chroniques du DT1.
Les outils d’épidémiologie génétique
Notre projet repose sur des outils d’épidémiologie génétique. Classiquement en épidémiologie, la mise en évidence de liens de causalité entre un facteur d’exposition et un trait nécessite d’éliminer tout autre facteur de confusion possible, tel que le sexe, en procédant à un tirage aléatoire des patients du bras soumis ou non à ce facteur d’exposition. Si un effet est détecté dans le groupe exposé, on peut ainsi conclure qu’il est dû au facteur d’exposition. Cela nécessite de poser ces questions de causalité en amont de l’étude. La randomisation mendélienne est une autre méthode d’épidémiologie récente et très puissante reposant sur le tirage aléatoire naturel des variants de l’ADN, dès la naissance. Ainsi, s’il existe un variant de l’ADN porté préférentiellement par le groupe exposé au facteur d’intérêt, on peut utiliser ce variant comme instrument pour tester directement la relation causale entre le facteur d’exposition et le trait étudié.
Dans notre projet, nous chercherons ainsi à identifier en premier lieu les variants génétiques associés aux différentes signatures glycémiques, considérées comme facteur d’exposition, et nous testerons ensuite leur effet causal sur les complications chroniques du DT1. Ce projet s’attèlera aussi à identifier des biomarqueurs moléculaires, cellulaires, et inflammatoires du risque glycémique associé aux complications.
Ce projet sera mené par quatre partenaires : Dr Amélie Bonnefond (Lille), Dr Claire Vandiedonck (Paris), Dr Marie Verbanck (Paris) et Dr Guy Fagherazzi (Luxembourg).
À quels résultats vous attendez-vous ?
Contrairement aux études observationnelles classiques, l’utilisation de la randomisation mendélienne devrait nous permettre d’établir s’il existe des liens de causalité entre les risques glycémiques et les complications du DT1. En explorant les bases génétiques et moléculaires des signatures glycémiques et des complications, notre étude vise à éclairer les mécanismes pathologiques et à ouvrir la voie à des traitements plus ciblés du DT1.
Au-delà de cette étude, notre projet fournira des données génétiques et omiques bénéfiques à l’ensemble de la cohorte SFDT1.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Étude de l’association des caractéristiques immunophénotypiques et des complications du diabète de type 1
Dr Fawaz Alzaid
Quel est le propos de votre étude ?
Notre étude porte sur l’utilisation des méthodes de phénotypage immunitaire à haute résolution que nous avons mises en place. Ce phénotypage se fait principalement par deux moyens :
• la cytométrie en flux
• ou le séquençage de noyaux uniques des cellules immunitaires circulantes (PBMCs).
Nous allons associer les caractéristiques immunophénotypiques aux complications du diabète de type 1 (DT1), principalement le risque cardiovasculaire, ainsi qu’à des aspects psychologiques importants tels que la détresse liée au diabète. La détresse liée au diabète désigne un état émotionnel causé par la gestion quotidienne du diabète, souvent associé à un contrôle glycémique sous-optimal et à des complications du diabète de type 1. Nous avons appliqué ces méthodes dans nos études récentes sur la sévérité du Covid-19 et sur le risque cardiovasculaire chez les patients atteints d’un diabète de type 2.
À quels résultats vous attendez-vous ?
Nous nous attendons à ce que les caractéristiques immuno-phénotypiques identifiées grâce à notre méthode soient significativement associées aux complications majeures du DT1, telles que le risque cardiovasculaire, ainsi qu’à des aspects psychologiques comme la détresse liée au diabète.
Ces associations devraient fournir des informations précieuses sur les mécanismes sous-jacents de ces complications et aspects psychologiques et, potentiellement, de nouveaux biomarqueurs pour leur prédiction et leur gestion.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Diabète de type 1 et détresse liée au diabète
Dulce Canha
Quel est le propos de votre étude ?
L’objectif de mon travail est de fournir une caractérisation approfondie des participants de la cohorte SFDT1 en fonction de leur niveau de détresse liée au diabète.
À quels résultats vous attendez-vous ?
Nous nous attendons à ce que l’augmentation de la détresse liée au diabète soit associée à plusieurs facteurs, y compris des caractéristiques socio-économiques, individuelles et liées au diabète. Nous émettons l’hypothèse qu’elle joue un rôle central dans le fardeau du diabète de type 1 et qu’il est important de prendre en compte sa variabilité dans le temps.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Troubles des conduites alimentaires et diabète de type 1
Pr Patrick Ritz, Dr Gloria Aguayo, Dr Guy Fagherazzi, Pr Hélène Hanaire
Quel est le propos de votre étude ?
Concerné par la prise en charge des personnes souffrant de troubles des conduites alimentaires (TCA), j’ai eu la chance de pouvoir étudier la cohorte SFDT1, dans le cadre d’une collaboration avec les promoteurs, et le laboratoire LIH. L’université de Toulouse m’a missionné pendant 2 mois pour avancer sur le projet.
Troubles des conduites alimentaires et diabète de type 1, pourquoi ?
Les personnes vivant avec un diabète de type 1 (DT1) souffrent de TCA, qui se manifestent comme un trouble classique des conduites alimentaires (hyperphagie boulimique, boulimie nerveuse, troubles non spécifiques, anorexie mentale) et/ou une restriction délibérée du traitement par insuline (mésusage), dans l’objectif de contrôler le poids. Bien que peu d’études analysent la prévalence de ce trouble, les chiffres atteindraient jusqu’à 40 % des femmes et jusqu’à 15 % des hommes. La crainte est que cette prévalence ait augmenté dans le contexte de l’augmentation de celle des TCA après le Covid. En Grande-Bretagne, en l’absence de critère diagnostique formel, les prévalences estimées sont très variables, entre 8 et 36 %. Dans la littérature, il est mentionné à la fois la souffrance de ces personnes (culpabilité, honte, charge mentale…) et la gravité potentielle, parce qu’il y a plus de complications chroniques du diabète et plus d’épisodes d’acidocétose.
Le rapport parlementaire britannique
Rt Hon Teresa May, ancienne première ministre, et Sir George Howarth MP ont été alertés par l’insuffisance de prise en charge des personnes vivant avec un DT1 et souffrant de TCA. Ils ont promu un groupe de travail et un rapport. Le constat est qu’il n’y a pas de consensus international pour le diagnostic et le collège royal des psychiatres britanniques recommande de créer un mouvement (momentum) pour un consensus international. À cause de la difficulté de la reconnaissance du trouble, et pour améliorer la situation, le rapport suggère que les soignants soient mieux formés (1). Cela suggère également que le traitement de ces TCA dans le contexte du DT1 n’est peut-être pas le même que le traitement classique.
Il y a donc besoin d’un parcours coordonné à la fois pour les soins somatiques et les soins psychiques, avec une formation des somaticiens aux prises en charge psy et des psychologues et psychiatres à ce qu’est le DT1 et ce que demande son traitement.
À quels résultats vous attendez-vous ?
Nous nous sommes focalisés sur les personnes de la cohorte pour lesquelles il y avait à la fois des données de mesure continue du glucose, une réponse au score SCOFF de dépistage des TCA, et une réponse à une question spécifique au sujet du mésusage de l’insuline (un sous-dosage délibéré du traitement, appelé encore diaboulimie). Ces données sont disponibles chez plus de 1 000 personnes.
Nous allons analyser le phénotype de ces personnes de façon à pouvoir mieux les identifier. L’idée générale est de mettre « la puce à l’oreille » des soignants pour que le sujet puisse être éventuellement abordé dans le parcours.
En connaissant mieux les phénotypes, nous espérons aller vers une médecine plus personnalisée, et donc être en capacité de toucher les patients pour pouvoir les aider, et de former les soignants à reconnaître ce trouble et à créer des parcours spécifiques.
Les premiers résultats suggèrent que les personnes souffrant de TCA classiques ne sont pas les mêmes que les personnes qui souffrent de mésusage de l’insuline.
1. New Parliamentary inquiry into type 1 diabetes and eating disorders launched. 20/06/22. Disponible sur : jdrf.org.uk/news/new-parliamentary-inquiry-into-type-1-diabetes-and-eating-disorders-launched/.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Foundation CGM : développer des stratégies de précision en diabétologie
Dr Guy Fagherazzi
Quel est le propos de votre étude ?
Le projet Foundation CGM a pour objectif de libérer tout le potentiel des données de lecteur de glycémie en continu (CGM) pour améliorer la vie des personnes qui ont un diabète. Aujourd’hui, nous n’utilisons qu’une infime partie de l’information contenue dans les données brutes des CGM, à travers l’estimation de métriques agrégées sur deux semaines, telles que le temps passé dans la cible, en hypo/hyperglycémie, le GMI ou le coefficient de variation. Ces métriques sont bien établies en pratique et en recherche clinique, mais sont en réalité des moyennes d’informations plus granulaires, sur les 14 derniers jours, et ne prennent pas en compte les évolutions intra-individuelles ou des éléments temporels ou dynamiques.
Notre hypothèse est qu’il est possible de développer un modèle de fondation de données CGM, en utilisant un algorithme d’intelligence artificielle qui permettra de décrire les caractéristiques d’une trace CGM de manière plus fine et ainsi d’exploiter toute l’information disponible pour affiner la compréhension des diabètes et développer des stratégies de santé de précision en diabétologie.
À quels résultats vous attendez-vous ?
Nous allons développer un modèle de fondation sur de grands volumes de données brutes de CGM. Pour cela, nous allons procéder en deux temps.
• Tout d’abord, collaborer avec des fabricants de CGM pour auto-entraîner un modèle de fondation à partir d’un volume très important de données CGM, et combiner ces données avec des données CGM disponibles en accès libre dans le diabète de type 1, de type 2, gestationnel et en population générale non diabétique. Cette première étape a pour objectif d’identifier des caractéristiques de CGM les plus importantes, et d’avoir une approche la plus universelle possible.
• Dans un second temps, nous irons valider la pertinence clinique de ce modèle auto-entraîné dans la cohorte SFDT1 et corréler les caractéristiques identifiées dans l’étape 1 avec de nombreux paramètres cliniques liés au diabète (paramètres glycémiques, complications, caractéristiques individuelles, fardeau du diabète).
Le modèle de fondation CGM sera ensuite publié et mis à disposition de la communauté afin d’être utilisé en recherche clinique pour améliorer l’évaluation des nouvelles stratégies thérapeutiques.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Le fardeau du diabète chez les personnes atteintes de diabète de type 1 : une approche d’analyse de réseau
Dr Gloria A. Aguayo
Quel est le propos de votre étude ?
Les personnes vivant avec le diabète de type 1 sont confrontées à des traitements complexes et à des complications aiguës et chroniques. Deux éléments cruciaux affectant la qualité de vie sont la gestion et la prévention des hypoglycémies sévères et la prévention d’autres complications chroniques liées au diabète. Le traitement et le fardeau de la maladie peuvent affecter la qualité de vie et la santé mentale des personnes atteintes de diabète de type 1 (DT1), principalement en raison du développement d’une détresse liée au diabète, qui peut ensuite avoir des conséquences sur les soins du diabète et les résultats glycémiques.
La principale limite réside dans la dissociation des différentes dimensions du fardeau du diabète afin de personnaliser les soins du diabète. Certaines variables sont entrelacées dans des relations mutuelles complexes, qui doivent être expliquées. Les associations individuelles de symptômes peuvent être étudiées à l’aide de techniques de régression. Cependant, dans des situations réelles, différents déterminants sont associés à d’autres variables dans un environnement interconnecté. Nous proposons une approche innovante fondée sur une analyse de réseau, qui permet l’intégration d’associations et d’interactions entre variables.
L’objectif principal de cette étude était d’utiliser l’analyse de réseau pour identifier le fardeau du diabète chez les personnes atteintes de DT1.
En pratique, comment procédez-vous ?
Nous utilisons les données de personnes atteintes de DT1 ayant participé à l’étude de cohorte SFDT1 avec les informations disponibles des questionnaires. Nous avons analysé les données collectées lors de la visite de référence sur les participants éligibles inscrits entre le début de l’étude (décembre 2020) et février 2024.
Nous construisons un réseau de symptômes à l’aide des questionnaires suivants :
• questionnaire sur les domaines problématiques du diabète (PAID, détresse liée au diabète),
• enquête sur la peur de l’hypoglycémie-II (HFS-II),
• audit de la qualité de vie dépendante du diabète (ADDQOL),
• questionnaire sur la charge de traitement (TBQ),
• et quelques questions sur l’incidence du diabète sur la vie scolaire ou professionnelle.
Nous allons identifier un réseau du fardeau du diabète. Avec la modélisation de réseau, nous parviendrons à démêler des associations complexes.
Ce modèle va permettre d’identifier les variables les plus centrales (c’est-à-dire celles qui ont le plus d’effet sur l’ensemble du réseau), qui sont celles à mettre en priorité lors de l’établissement d’un plan de traitement. Des recherches futures pourraient appliquer cette méthode à une analyse longitudinale avec des mesures répétées de questionnaires.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
GUT-DIAB1 : symptômes digestifs et équilibre glycémique chez le patient atteint de diabète de type 1
Dr Emmanuelle Lecornet-Sokol, Dr Heithem Soliman, Pr Benoît Coffin, Pr Henri Duboc, Pr Harry Sokol, Dr Chloé Amouyal
Quel est le propos de votre étude ?
Peu d’études existent pour décrire les troubles digestifs chez les patients avec diabète de type 1 (DT1). Très souvent sous-estimés, mais néanmoins responsables d’une altération de la qualité de vie, les troubles digestifs liés au diabète toucheraient un quart des patients avec DT1, d’autant plus que l’équilibre glycémique, évalué sur l’HbA1c, est moins bon (1).
Causes des troubles digestifs dans le diabète de type 1
Parmi ces troubles, les plus connus sont ceux en rapport avec une neuropathie autonome diabétique, dont la gastroparésie, caractérisée par un retard de la vidange gastrique sans obstruction, la diarrhée motrice et la constipation. Une atteinte végétative du diabète est à l’origine dans la grande majorité des cas. Néanmoins, d’autres troubles ont été décrits et leurs liens avec le diabète restent complexes. L’hypothèse d’une dysfonction pancréatique exocrine pourrait chez certains expliquer ballonnements et diarrhées. L’hyperglycémie et la déshydratation peuvent être responsables d’un dysfonctionnement des cellules épithéliales gastro-intestinales et d’une altération de la motilité intestinale. Ont été aussi décrits un déséquilibre de la flore intestinale associé à une inflammation chronique de bas grade ; ces éléments contribueraient à une dysbiose (2). Parmi les autres causes de troubles digestifs, on retrouve également une maladie cœliaque associée chez 1 % des patients ou encore l’utilisation de certains traitements antidiabétiques (metformine, agonistes des récepteurs GLP1).
Dans une récente étude de cohorte canadienne portant sur 2 370 patients adultes et pédiatriques, la présence de troubles digestifs était également augmentée (OR = 1,78 ; IC 95 % : 1,47-2,15 ; p < 0,001), et l’HbA1c était plus élevée à 8,3 % chez ces patients versus 8,1 % chez les patients sans symptômes (p = 0,039). Les symptômes semblaient corrélés également à l’âge, la durée de la maladie et la présence de complications microvasculaires (3).
Objectif de l’étude
L’utilisation de la mesure continue du glucose (CGM) a révolutionné la prise en charge des patients avec DT1 et permet une analyse plus fine de l’équilibre glycémique, de la présence des écarts glycémiques et de la variabilité. Nous cherchons ainsi à évaluer si les symptômes digestifs (haut et bas) sont corrélés avec l’équilibre glycémique évalué par le temps dans la cible chez les patients vivant avec un DT1.
En pratique
Pour ce faire, nous allons étudier les patients inclus dans l’étude SFDT1. Il s’agit d’une cohorte française multicentrique rassemblant près de 3 700 patients vivant avec un DT1, créée à l’initiative de la SFD (Société francophone du diabète) et dont la promotion est faite par la FFRD (Fédération francophone pour la recherche sur le diabète). Les participants reçoivent régulièrement des questionnaires autour de leur maladie. Dans le cadre de notre étude, nous utiliserons un questionnaire simple permettant d’évaluer les symptômes digestifs et d’avoir accès à leurs résultats de CGM.
Les patients ayant une maladie cœliaque, une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (maladie de Crohn ou rectocolite hémorragique) ou encore les femmes enceintes seront exclus.
L’objectif principal sera d’évaluer la différence d’équilibre glycémique entre les patients présentant des troubles digestifs (haut ou bas) et les asymptomatiques. Nous étudierons aussi la corrélation des symptômes digestifs avec le coefficient de variabilité, la durée d’évolution du diabète, le type de traitement, la présence de complications (dont neuropathie).
À quels résultats vous attendez-vous ?
Nous espérons ainsi mieux évaluer les troubles digestifs chez les patients avec un DT1 et mettre en valeur le lien entre ces symptômes et l’équilibre glycémique global des patients. On peut ainsi émettre l’hypothèse qu’une diminution de la variabilité digestive permettrait d’améliorer les troubles digestifs.
1. Leeds JS, Hadjivassiliou M, Tesfaye S, Sanders DS. Lower gastrointestinal symptoms are associated with worse glycemic control and quality of life in type 1 diabetes mellitus. BMJ Open Diabetes Res Care 2018 ; 6 : e000514.
2. Del Chierico F, Rapini N, Deodati A et al. Pathophysiology of type 1 diabetes and gut microbiota role. Int J Mol Sci 2022 ; 23 : 14650.
3. De Melo EN, Clarke ABM, McDonald C et al Gastrointestinal symptoms in type 1 diabetes: relationship with autoimmune and microvascular complications. J Clin Endocrinol Metab 2022 ; 107 : e2431-7.
4. Du YT, Rayner CK, Jones KL et al. Gastrointestinal symptoms in diabetes: prevalence, assessment, pathogenesis, and management. Diabetes Care 2018 ; 41 : 627-37.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
Gradient socio-économique des facteurs de risque et complications du diabète chez des patients vivant avec un diabète de type 1 en France
Pr Hélène Bihan, Dr Sara Barraud, Pr Emmanuel Cosson
Quel est le propos de votre étude ?
Pour les patients vivant avec un diabète de type 2 (DT2), les associations entre faible niveau socio-économique, prévalence des facteurs de risque, moindre équilibre du diabète et risque de complications ont été largement démontrées (1). Pour les patients vivant avec un DT1, quelques études provenant du Royaume-Uni, de la Suède, de la Finlande et du Danemark suggèrent également un surrisque de morbi-mortalité chez les patients de plus faible niveau socio-économique, mais avec des résultats parfois controversés.
Les données dans le diabète de type 1
• En France, une étude réalisée auprès de 1 940 spécialistes, ayant inclus entre 5 et 10 enfants et adultes ayant un DT1, a démontré que le bas niveau d’éducation et/ou revenus était associé à un plus fort risque d’acidocétose l’année précédente pour tous, et une prévalence supérieure des complications chez les adultes, mais pas chez les enfants (2).
• Dans une cohorte hongroise en 2008, il s’avère que les patients ayant le plus faible niveau d’éducation sont plus à risque de déclarer une consommation d’alcool, de tabac et une moindre activité physique, leur HbA1c est plus élevée que ceux ayant un plus fort niveau d’éducation, et ceci de façon très significative (3).
• En Suède, une grande étude longitudinale a inclus 24 947 adultes avec un DT1, suivis 6 ans : elle met en évidence que le niveau d’éducation élevé est associé à une réduction de 33 % des accidents vasculaires cérébraux alors que dans les deux quintiles de plus faibles revenus, les événements cardiovasculaires non fatals et les décès sont deux et trois fois supérieurs que dans la population de haut niveau éducatif (4).
• Dans une étude longitudinale écossaise, le taux standardisé de mortalité suit un gradient socio-économique très net, même si les taux diminuent entre les deux périodes de suivi de 2006-2010 et 2011-2015. Dans cette étude, la précarité était mesurée par le Scottish Index of Multiple Deprivation, calculé selon les niveaux moyens d’éducation, de revenus, et d’insécurité d’une zone géographique (5).
Objectif du projet
Ainsi, nous souhaitons, dans la cohorte SFDT1, étudier le lien entre le niveau socio-économique, les facteurs de risque et la prévalence des complications à l’inclusion.
Le niveau socio-économique sera évalué avec quatre variables :
• le niveau d’éducation,
• le niveau professionnel,
• le statut marital
• et le score de précarité EPICES.
À quels résultats vous attendez-vous ?
Cette étude aura comme principale force de pouvoir ajuster la prévalence des complications sur les facteurs de risque. Les premières analyses montrent que 25 % des individus inclus sont définis comme précaires (par le score EPICES), avec une prévalence de l’obésité dans la cohorte autour de 17 % et du tabagisme actif de 23 %.
Si nous démontrons l’existence d’un gradient socio-économique à la fois sur les facteurs de risque et sur les complications, ces résultats sont majeurs sur le plan de la santé publique. Ils inciteront à promouvoir des actions plus ciblées, telles qu’une évaluation de la numération et littératie en santé chez les patients et à s’interroger sur les problématiques de non recours aux soins et de reste à charge.
1. Tatulashvili S, Fagherazzi G, Dow C et al. Socioeconomic inequalities and type 2 diabetes complications: A systematic review. Diabetes Metab 2020 ; 46 : 89-99.
2. Lièvre M, Marre M, Robert JJ et al. Cross-sectional study of care, socio-economic status and complications in young French patients with type 1 diabetes mellitus. Diabetes Metab 2005 ; 31 : 41-6.
3. Nádas J, Putz Z, Fövényi J et al. Cardiometabolic risk and educational level in adult patients with type 1 diabetes. Acta Diabetol 2009 ; 46 : 159-62.
4. Rawshani A, Svensson AM, Rosengren A et al. Impact of socioeconomic status on cardiovascular disease and mortality in 24,947 individuals with type 1 diabetes. Diabetes Care 2015 ; 38 : 1518-27.
5. Campbell RAS, Colhoun HM, Kennon B et al. Socio-economic status and mortality in people with type 1 diabetes in Scotland 2006-2015: a retrospective cohort study. Diabet Med 2020 ; 37 : 2081-28.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
SFDT1 – Existe-t-il une association entre la sévérité des complications et la qualité de vie chez les personnes vivant avec un diabète de type 1 ?
Dr Sara Barraud, Dr Gloria Aguayo, Pr Emmanuel Cosson, Pr Jean-Pierre Riveline, Dr Guy Fagherazzi
Quel est le propos de votre étude ?
Comme toute pathologie chronique, le diabète de type 1 (DT1) peut avoir un effet sur la qualité de vie (QdV) (1). Pendant longtemps, les principales préoccupations étaient l’estimation de l’équilibre glycémique et la recherche de complications. Mais l’importance de l’évaluation de la QdV des personnes vivant avec une pathologie chronique est de plus en plus mise en avant, ainsi que les facteurs qui la modulent.
Évaluation de la qualité de vie
Pour évaluer la QdV, on peut utiliser différents outils, en particulier des auto-questionnaires permettant de mesurer le niveau de QdV ressenti par les patients (2). Ces questionnaires peuvent être soit génériques, et donc utilisables dans la population générale et pour toute pathologie, soit spécifiques permettant ainsi d’explorer les particularités de chaque pathologie. Dans la cohorte SFDT1 différents questionnaires sont proposés, en particulier le questionnaire EQ5D5L, rempli lors de l’inclusion, et le questionnaire ADDQoL, envoyé électroniquement 1 mois après.
• Le questionnaire EQ5D5L comporte une échelle visuelle analogique (EVA) allant de 0 (pire QdV) à 100 (meilleure QdV) et cinq questions explorant différents domaines de la QdV (mobilité, autonomie, activités courantes, douleurs/gêne et anxiété/dépression) (3).
• Le questionnaire ADDQoL est composé d’une question s’intéressant à la qualité de vie globale, une seconde à l’effet du diabète sur la QdV et explore ensuite 19 domaines spécifiques (loisirs, vie professionnelle, déplacements, vacances, aptitude physique, vie familiale, vie sociale, relations sentimentales, vie sexuelle, apparence physique, confiance en soi, motivation, réaction des autres, perception de l’avenir, situation financière, conditions de vie, dépendance des autres, liberté de manger, liberté de boire) (4).
L’objectif de l’étude est d’évaluer la QdV chez les adultes vivant avec un DT1 et l’effet des complications sur la qualité de vie.
À quels résultats vous attendez-vous ?
La qualité de vie globale et spécifique
Dans une étude récente en population générale en France, la QdV globale a été évaluée à 73.4/100 en moyenne grâce à l’échelle globale EQ5D5L. Nous nous attendions donc à un résultat un peu inférieur, avec une baisse plus marquée chez les patients les plus jeunes (18-35 ans). Nous pensions que les domaines génériques les plus atteints seraient l’anxiété/dépression suivis des douleurs/gênes (de l’ordre de 50 %), mais qu’ils décriraient l’effet comme léger ou modéré. En revanche, dans cette population relativement jeune (âge moyen de 44 ± 14 ans), nous nous attendions à ce que l’autonomie soit très peu dégradée. Ce qui semble se confirmer avec les premiers résultats. Concernant les domaines spécifiques de la QdV, il semble que la liberté de manger, l’aptitude physique, les vacances, la perception de l’avenir et les loisirs soient les domaines pour lesquels le retentissement du diabète soit le plus important.
L’effet des complications sur la qualité de vie
Dans la seconde partie de cette étude, nous voulions évaluer l’effet de la sévérité des complications du diabète sur la QdV. Pour cela, nous avons utilisé le score DCSI pour Diabetes Complication Score Index, qui comporte sept catégories de complications : rétinopathie, néphropathie, neuropathie, complications cardiovasculaires, complications neurovasculaires, atteinte vasculaire périphérique et complications métaboliques (hypoglycémie sévère ou acidocétose) (5). Nous pensions que plus le niveau de complication augmenterait plus la QdV diminuerait concernant à la fois la QdV globale, mais également les différents domaines génériques et spécifiques. Toute-fois, il est probable que l’association ne soit pas retrouvée pour certains domaines, en particulier l’anxiété/dépression atteint dès la découverte du diabète et la liberté de boire et de manger, qui sont inhérents au diabète lui-même.
1. Stewart AL, Greenfield S, Hays RD et al. Functional status and well-being of patients with chronic conditions. Results from the Medical Outcomes Study. JAMA 1989 ; 262 : 907‑13.
2. Hermanns N, Kulzer B, Ehrmann D. Person-reported outcomes in diabetes care: What are they and why are they so important? Diabetes Obes Metab 2024 ; 26 : 30‑45.
3. Devlin N, Parkin D, Janssen B. Methods for analysing and reporting EQ-5D data. Cham: Springer 2020.
4. Bradley C, Todd C, Gorton T et al. The development of an individualized questionnaire measure of perceived impact of diabetes on quality of life: the ADDQoL. Qual Life Res 1999 ; 8 : 79‑91.
5. Young BA, Lin E, Von Korff M et al. Diabetes complications severity index and risk of mortality, hospitalization, and healthcare utilization. Am J Manag Care 2008 ; 14 : 15‑23.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.