Résumé
Différentes manifestations dermatologiques sont associées au diabète, certaines pouvant en être un mode de découverte, d’autres apparaissant au cours de son évolution, parfois en rapport avec un mauvais contrôle de celui-ci. Une relation directe peut être établie pour certaines d’entre elles, alors qu’elle est plus difficile à démontrer pour d’autres. Les antidiabétiques oraux et les insulines peuvent être responsables de différents types de dermatoses. Des réactions cutanées, parfois sévères, sont également rapportées, secondaires à l’utilisation de dispositifs médicaux, capteurs de glucose et pompes à insuline.
Abstract
Diabetes and dermatoses
Several dermatoses are associated with diabetes mellitus; some may appear before the diagnosis of diabetes, others during its evolution. This relationship can be easily proven in some skin disorders but it is not clear in others. Differents types of dermatoses are secondary to oral antidiabetics and insulins. Cutaneous adverse events related to continuous glucose monitoring and continuous subcutaneous insulin infusion devices are also reported.
Introduction
Il existe de nombreuses manifestations dermatologiques au cours du diabète, qu’il soit de type 2, de loin le plus fréquent, ou de type 1, certaines pouvant en être un mode de découverte, d’autres apparaissant au cours de son évolution, parfois en rapport avec un mauvais contrôle de celui-ci (1-3).
Fréquence
Dans les différentes études de la littérature, leur fréquence est très variable, en fonction :
• du type du diabète, certaines étant surtout associées au diabète de type 1, d’autres au diabète de type 2,
• du type de la dermatose
• et de la population étudiée (âge, pays ou continent d’origine…).
De façon globale, 30 à 80 % des diabétiques auront au moins une manifestation dermatologique au cours de l’évolution de leur maladie (4).
Mécanismes physiopathologiques
Ces dermatoses sont dues à des anomalies cutanées d’origine biochimique, métabolique, immunologique, vasculaire, neurologique, celles-ci étant parfois intriquées chez un même patient.
Les effets du diabète sur la peau sont complexes, multifactoriels. L’hyperglycémie a un effet direct sur la prolifération et les fonctions des kératinocytes et des fibroblastes. Elle augmente aussi la glycolysation non enzymatique des protéines, des glucides et des acides nucléiques entraînant une production exagérée des produits de glycation avancés (AGEs advanced glycation end products), ceux-ci étant responsables d’altérations structurelles et fonctionnelles de la peau (4). Le diabète peut aussi agir de manière indirecte par l’intermédiaire d’anomalies vasculaires, micro- et macro-angiopathie, et d’anomalies neurologiques, sensitives, motrices et neurovégétatives.
Les complications dermatologiques aiguës
Ce sont essentiellement des infections cutanées.
Les infections cutanées
Facteurs favorisants
Elles sont favorisées par :
• les anomalies de la barrière cutanée (diminution de la synthèse des lipides épidermiques),
• une diminution de la production de peptides anti-microbiens,
• un dysfonctionnement des polynucléaires neutrophiles (chimiotactisme et phagocytose),
• des modifications du taux de certaines cytokines (TNF alpha, IL-6…).
Elles sont plus fréquentes et souvent plus sévères que chez les non diabétiques.
Infections bactériennes
Ce sont surtout des infections bactériennes à staphylocoques, streptocoques ou autres germes (Pseudomonas, Serratia…) ; parfois, plusieurs germes sont associés. Ainsi, le diabète fait partie des comorbidités participant à la sévérité de l’érysipèle, habituellement dû au streptocoque A bêta-hémolytique (Fig. 1), des autres dermo-hypodermites non nécrosantes et de la fasciite nécrosante.
Figure 1 – Érysipèle bulleux.
Infections mycosiques
Les infections mycosiques dues à des dermatophytes (Trichophyton rubrum, Trichophyton mentagrophytes) et surtout à des levures (Candida albicans) sont également très fréquentes, au niveau des ongles, des grands et des petits plis (Fig. 2), de la région génitale (vulvite (Fig. 3), cervicite, balanite).
Figure 2 – Candidose au niveau des plis (Candida albicans).
Figure 3 – Vulvo-vaginite.
Dans les plis, il y a souvent une co-infection mycosique et bactérienne (Candida albicans-staphylocoque) (Fig. 4).
Figure 4 – Co-infection mycosique et bactérienne (candida albicans-staphylocoque).
Quand on suspecte une infection, en particulier une mycose, il est toujours utile de faire un prélèvement pour confirmer le diagnostic. En effet, au niveau des ongles, le traitement spécifique est long et contraignant et l’atteinte unguéale peut être due à d’autres causes (psoriasis, traumatismes, atteinte vasculaire…) (5).
Exceptionnellement, il s’agit de localisations cutanées d’infections mycosiques systémiques (pulmonaires, ORL, neurologiques…), parfois graves, comme une mucormycose ou une aspergillose.
Les xanthomes éruptifs
Aspect clinique
Les xanthomes éruptifs peuvent aussi se développer rapidement. Ce sont des papules de quelques millimètres de diamètre, rouges ou jaunâtres, plus ou moins nombreuses, apparaissant brutalement sur les fesses, le tronc, les faces d’extension des membres, parfois très diffuses (Fig. 5).
Figure 5 – Xanthomes éruptifs.
Diagnostic
L’aspect clinique permet le plus souvent de faire le diagnostic. Si on pratique une biopsie, les images histologiques sont caractéristiques montrant des cellules histiocytaires spumeuses et parfois des cellules géantes multinucléées avec des dépôts lipidiques dans leur cytoplasme.
Causes et évolution
Ces xanthomes sont secondaires à une hypertriglycéridémie majeure, souvent associée à un diabète non connu ou mal équilibré et parfois à une intoxication alcoolique.
Ils disparaissent progressivement quand les anomalies métaboliques sont corrigées.
Les complications dermatologiques chroniques
La dermopathie diabétique
Épidémiologie et causes
C’est la plus fréquente des manifestations cutanées non infectieuses du diabète, observée chez 10 à 25 % des patients, jusqu’à 50 % dans certaines études, plutôt chez des hommes, avec un diabète de type 2 ancien, mal contrôlé. Sa présence paraît corrélée avec les complications microvasculaires du diabète, rétinopathie, néphropathie et neuropathie.
Aspect clinique
Ce sont de petites plaques, rouge-brun, arrondies, de 1 à 2 cm, asymptomatiques, siégeant habituellement sur la face antérieure des jambes. Elles évoluent vers l’atrophie et l’hyperpigmentation (Fig. 6), sans être vraiment influencées par l’équilibre du diabète.
Figure 6 – Dermopathie diabétique.
Évolution
Les lésions peuvent lentement régresser alors que d’autres apparaissent.
L’atteinte de la microcirculation à l’origine d’une fragilité cutanée et de troubles de la cicatrisation après des micro-traumatismes en serait responsable.
Aucun traitement n’a montré de réelle efficacité. C’est la protection cutanée qui peut éviter l’apparition de nouvelles lésions.
La bullose des diabétiques
Elle apparaît le plus souvent au cours de l’évolution du diabète, parfois associée à des complications rénales ou neurologiques.
Aspect clinique
Ce sont de grosses bulles tendues en peau saine ou sur une base inflammatoire, à contenu clair (Fig. 7), ni douloureuses ni prurigineuses. Elles siègent essentiellement sur les jambes et les pieds, souvent bilatérales, rarement sur les membres supérieurs. Elles évoluent vers des érosions, puis des croûtes, cicatrisant en quelques semaines.
Figure 7 – La bullose des diabétiques.
Causes
Des micro-traumatismes sur une peau “fragile” pourraient en être responsables.
Il faut éliminer d’autres causes de dermatoses bulleuses comme une toxidermie ou une pemphigoïde bulleuse induite par les gliptines. En cas de doute diagnostique, une biopsie cutanée avec examen en immunofluorescence peut être faite.
Les états sclérodermiformes
Épidémiologie et causes
Le sclérœdème des diabétiques (sclérœdème de Buschke) est associé à un diabète chez environ la moitié des patients et, à l’inverse, 2 à 3 % des diabétiques de type 2,
souvent obèses, en seraient atteints. Ces anomalies cutanées sont dues à des modifications des fibres de collagène secondaires au stress oxydatif et à l’accumulation des AGEs.
Aspect clinique
Il se manifeste par l’apparition plus ou moins rapide d’un épaississement de la peau qui devient indurée, difficilement plissable, au niveau de la nuque, du haut du dos (Fig. 8), s’étendant sur le tronc et les membres supérieurs en respectant les extrémités, ceci entraînant une limitation des mouvements ou même de l’expansion thoracique quand il y a une atteinte thoracique.
Figure 8 – Sclérœdème des diabétiques.
Évolution et traitements
L’évolution est chronique, sans tendance à la régression.
Différents traitements (photothérapie, immunosuppresseurs…) peuvent être proposés en fonction de la gêne fonctionnelle, mais leurs résultats sont souvent décevants.
Cheiro-arthropathie
La cheiro-arthropathie associe, chez des patients ayant un diabète ancien, sévère, une infiltration scléreuse des doigts, débutant typiquement au niveau de l’auriculaire, et un enraidissement des articulations inter-phalangiennes, métacarpo-phalangiennes et des poignets. Elle est bien objectivée par le signe de la prière (impossibilité d’étendre complètement les doigts lors de l’accolement des deux mains).
Le prurit
Défini comme une sensation entraînant le besoin de se gratter, il peut être localisé ou diffus.
Prurit localisé
Le prurit localisé, anal et/ou génital, peut être révélateur du diabète, souvent dû à une candidose.
Prurit diffus
En revanche, le prurit diffus n’est pas directement lié au diabète. Les mêmes causes doivent être cherchées que chez les sujets non diabétiques, parmi lesquelles une prise médicamenteuse, une xérose cutanée, une insuffisance rénale elles-mêmes favorisées par le diabète, ou toute autre dermatose prurigineuse.
Les troubles trophiques des membres inférieurs
Causes
Ils sont très fréquents au cours du diabète, regroupés sous le terme de “pied diabétique”, celui-ci pouvant être secondaire à différents facteurs le plus souvent intriqués : neuropathie, atteinte vasculaire (micro- et/ou macro-angiopathie), déformations articulaires, leur évolution pouvant être sévère (infections cutanées, ostéo-articulaires, amputations…) (6).
Les lésions apparaissent soit spontanément, soit le plus souvent après un traumatisme. Celui-ci peut être mineur, mais répété et non perçu par le patient étant donné les troubles de la sensibilité.
Tableaux cliniques
Plusieurs tableaux cliniques peuvent être observés.
• Le mal perforant plantaire débute par une lésion hyperkératosique au niveau de zones d’hyperpression des plantes des pieds puis apparaît une poche de décollement sous-cutanée. Plus ou moins rapidement, des fissures entraînent une effraction cutanée aboutissant à une ulcération au sein d’une zone d’hyperkératose (Fig. 9). L’infection peut s’extérioriser à la peau ou diffuser en profondeur vers les gaines tendineuses, les articulations ou l’os sous-jacent. Ces lésions d’origine neuropathique se distinguent par leur caractère indolore, ceci pouvant expliquer leur “découverte” souvent tardive (7).
Figure 9 – Mal perforant plantaire.
• L’ulcère artériel est unique ou multiple, de plus ou moins grande taille, creusant, pouvant mettre à nu les structures sous-jacentes (Fig. 10), de topographie suspendue ou distale (dos du pied, orteil). La peau péri-ulcéreuse est froide, lisse, dépilée. La douleur est habituellement intense. Au diabète, s’associent souvent d’autres facteurs de risque vasculaire, hypertension artérielle, tabagisme…
Figure 10 – Angiodermite nécrosante (photo de gauche) et ulcère artériel (photos de droite).
• L’angiodermite nécrosante est due à une artériosclérose des vaisseaux dermiques, les grands axes vasculaires artériels et veineux étant normaux (Fig. 10). Elle s’installe brutalement sous forme d’une plaque purpurique sur la face antérieure de la jambe, souvent dans les suites d’un traumatisme, évoluant rapidement vers une ulcération très douloureuse, à bords nécrotiques, irréguliers, en “carte de géographie”. Elle survient préférentiellement chez la femme après 60 ans, diabétique et hypertendue.
Prévention
Les mesures préventives sont indispensables chez tous les sujets ayant un diabète quels que soient son type et sa sévérité pour éviter la survenue de ces troubles trophiques :
• examen des pieds fait de façon régulière pour chercher un facteur déclenchant (plaie traumatique due aux chaussures, mycose des espaces interdigitaux et/ou des ongles, cors et durillons…) et mettre en route un traitement adapté,
• mise en évidence de points d’appui anormaux et de déformations articulaires,
• recherche de signes en faveur d’une neuropathie (test au monofilament) et/ou d’une artérite (calcul de l’index de pression systolique).
L’éducation du patient et de son entourage familial proche ainsi que des membres de l’équipe paramédicale (infirmière, podologue…) doit porter sur :
• les soins d’hygiène (toilette quotidienne avec un savon doux, séchage minutieux des espaces interdigitaux),
• la correction de la sécheresse cutanée (application quotidienne d’une crème émolliente sur les pieds et les membres inférieurs, mais aussi l’ensemble du corps),
• la prise en charge adaptée des anomalies unguéales,
• le choix du chaussage (chaussettes, chaussures).
Les dermatoses associées au diabète
Ce sont des affections dermatologiques associées, avec une fréquence plus ou moins grande, au diabète, mais qui peuvent se voir en l’absence de celui-ci.
L’Acanthosis nigricans
Aspect clinique
Il se manifeste par des lésions hyperkératosiques et hyperpigmentées siégeant dans les plis, en particulier du cou (Fig. 11) et axillaires, pouvant donner un aspect “sale, crasseux” gênant pour les patients.
Figure 11 – Acanthosis nigricans.
Causes
Il s’observe au cours de différentes endocrinopathies associées à une résistance à l’insuline dont font partie le diabète non insulinodépendant et/ou l’obésité. L’hyperinsulinisme favorise la synthèse de l’IGF1 (type 1 Insulin Growth Factor) qui, en se fixant sur des récepteurs des kératinocytes, stimule leur prolifération.
Traitements
Des traitements locaux kératolytiques (préparation à l’urée, vaseline salicylée, rétinoïdes) peuvent être prescrits, mais ce sont surtout la réduction de la surcharge pondérale et la correction des anomalies métaboliques qui permettent une régression des lésions.
Il ne faut pas oublier que l’Acanthosis nigricans peut aussi être un syndrome paranéoplasique lié en particulier à des tumeurs digestives.
Les acrochordons (Molluscum pendulum)
Ces lésions pédiculées, en plus ou moins grand nombre, siègent dans les grands plis, souvent associées à l’AN (Fig. 12).
Figure 12 – Acrochordons et Acanthosis nigricans.
La nécrobiose lipoïdique (NL)
Elle apparaît principalement chez des sujets diabétiques ou ayant une histoire familiale de diabète ou ayant des anomalies biologiques, mais à l’inverse peu de diabétiques (0,4 à 1,6 %), ont une NL, essentiellement des femmes jeunes (8).
Aspect clinique et évolution
Les lésions débutent par de petites papules qui s’élargissent progressivement formant des plaques bien délimitées avec une bordure violacée et un centre qui devient progressivement jaune-brun, atrophique avec des télangiectasies (Fig. 13). Uniques ou multiples, elles siègent habituellement sur la face antérieure des jambes, beaucoup plus rarement sur les membres supérieurs, l’abdomen, le cuir chevelu.
Figure 13 – Nécrobiose lipoïdique.
Diagnostic et évolution
Le diagnostic est clinique. En cas de doute, une biopsie peut être faite montrant des granulomes palissadiques, des foyers de nécrobiose et un infiltrat polymorphe avec des cellules épithélioïdes et des cellules géantes multinucléées.
L’évolution est chronique avec parfois l’apparition d’ulcérations, spontanément ou après un traumatisme (Fig. 14).
Figure 14 – Nécrobiose lipoïdique ulcérée.
Traitements
Différents traitements locaux (dermo-corticoïdes, inhibiteurs de la calcineurine) sont proposés, mais aussi des traitements systémiques très divers (pentoxyfylline, antipaludéens de synthèse, ciclosporine, anti-TNF alpha…) d’autant qu’il existe souvent une demande des patients étant donné le caractère inesthétique des lésions, mais le rapport bénéfice/risque doit être bien évalué.
Le granulome annulaire
Aspect clinique
Ce sont des papules fermes, bien délimitées, de couleur de la peau normale ou rosées, groupées en anneaux qui s’étendent de façon centrifuge. Elles siègent préférentiellement sur le dos des articulations (mains, coudes, genoux) (Fig. 15) et les faces d’extension des membres. Il existe aussi des granulomes annulaires profonds se manifestant par des nodules dermo-
hypodermiques, des formes généralisées avec une éruption diffuse faite d’éléments micro-papuleux (Fig. 16).
Figure 15 – Granulome annulaire.
Figure 16 – Granulome annulaire, forme diffuse.
Causes
Beaucoup d’études se sont intéressées aux relations entre granulome annulaire et diabète, certaines trouvant une association statistiquement significative, en particulier dans les formes généralisées ou d’évolution prolongée, d’autres non.
Traitements
De nombreuses thérapeutiques locales et systémiques sont proposées sans qu’aucune ne fasse vraiment la preuve de son efficacité, d’autant qu’il existe parfois une régression spontanée des lésions.
Le vitiligo
Se manifestant par des zones de dépigmentation plus ou moins étendues de la peau (Fig. 17) et parfois des cheveux et des poils, il est surtout observé au cours du diabète de type 1 (2-10 % des patients), secondaire à des mécanismes immunologiques (lymphocytes T cytotoxiques auto-réactifs), mais aussi dans le diabète de type 2, dû à des mécanismes différents (stress oxydatif).
Figure 17 – Vitiligo.
La pelade
Alopécie du cuir chevelu et/ou des poils du corps avec parfois une atteinte des ongles, elle est observée essentiellement dans le diabète de type 1, due à des mécanismes auto-immuns. Elle peut être associée à un vitiligo et à des anomalies thyroïdiennes.
Le psoriasis
Il s’agit d’une dermatose fréquente dans la population générale (2-3 % en France) (Fig. 18).
Figure 18 – Psoriasis.
Une relation significative avec le diabète de type 2 a été mise en évidence dans des études portant sur de grandes populations, surtout notée avec des psoriasis sévères (9).
Les dermatoses secondaires aux traitements du diabète
Les différents antidiabétiques oraux peuvent être à l’origine de toxidermies, leur fréquence et le type de l’éruption variant en fonction des molécules.
Les biguanides
Les manifestations cutanées dues aux biguanides, dont la metformine, sont peu fréquentes, quelques observations de vasculite et d’éruption photo-induite étant rapportées.
Les sulfamides hypoglycémiants
Les sulfamides hypoglycémiants peuvent être responsables, chez 2 à 3 % des patients traités, d’une éruption apparaissant habituellement dans les premières semaines après le début du traitement. Il s’agit le plus souvent d’une urticaire ou d’un exanthème maculo-papuleux, plus rarement d’une réaction photo-induite.
Les incrétinomimétiques
Les incrétinomimétiques (analogues du GLP-1 et inhibiteurs de la dipeptylpeptidase 4 ou gliptines) peuvent induire différents types d’éruptions cutanées (10). Les gliptines sont parfois responsables d’un angiœdème bradykinique, surtout lorsqu’elles sont associées aux inhibiteurs de l’enzyme de conversion ou aux sartans. Elles peuvent également, en particulier la vildagliptine, favoriser l’apparition d’une pemphigoïde bulleuse avec une fréquence statistiquement significative par rapport aux sujets contrôles de même âge (11). Cette dermatose bulleuse auto-immune apparaît dans un délai variable, de quelques semaines à de nombreux mois, après le début du traitement. Elle n’a pas de caractéristiques particulières par rapport à la forme non induite, si ce n’est des lésions muqueuses plus fréquentes et, lorsqu’elle est traitée, son évolution paraît identique que les gliptines soient ou non maintenues.
Les gliflozines
Les glifozines (inhibiteurs du SGLTr) entraînent une augmentation de la glycosurie expliquant la survenue fréquente d’infections génitales, en particulier candidosiques (vulvo-vaginites, balanites). De très rares cas de fasciite nécrosante périnéale (gangrène de Fournier) ont été rapportés, conduisant à une note d’information de l’ANSM en 2020.
Les insulines
Les effets secondaires dermatologiques locaux (érythème, plaque d’urticaire, lipohypertrophie, lipo-atrophie, calcifications… aux points d’injection) et systémiques (urticaire avec ou sans manifestations systémiques…) dus aux insulines sont plus rares actuellement avec les formes recombinantes ou purifiées. En cas de réactions allergiques IgE-dépendantes, des tests allergologiques doivent être réalisés pour identifier le ou les substances responsables, l’insuline elle-même, les conservateurs, des additifs…
Les dispositifs médicaux
Les pompes à insuline d’une part, les capteurs de glycémie d’autre part sont de plus en plus utilisés. Ces dispositifs médicaux peuvent être responsables de réactions cutanées locales, dues à une irritation ou à une allergie, parfois sévères, surtout chez l’enfant (13, 14). Des mesures de protection sont habituellement efficaces quand il s’agit d’un phénomène irritatif, mais elles sont le plus souvent insuffisantes en cas d’allergie, l’importance des lésions pouvant alors conduire à l’arrêt de l’utilisation de ce matériel.
Des tests allergologiques sont utiles pour mettre en évidence le ou les allergènes responsables, mais la nature exacte de tous les composants de ces dispositifs n’est pas toujours connue. Peuvent en effet être impliqués le dispositif en lui-même, mais aussi les pansements utilisés pour les maintenir ou encore les colles. Ce sont les acrylates, en particulier l’acrylate d’isobornyle (IBOA isobornyl acrylate), qui sont la principale cause d’allergie de contact due aux capteurs de glycémie et aux pompes à insuline (l’IBOA a été élu allergène de contact de l’année 2020…).
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.
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