Une étude publiée dans l’American Journal of Preventive Medicine montre que les préjugés liés au poids sont répandus parmi les adultes français, en particulier l’idée réductrice selon laquelle l’obésité est due à un manque de volonté. L’objectif de cette étude consistait à évaluer les préjugés négatifs liés au poids parmi les participantes et participants de l’étude NutriNet-Santé. Les préjugés explicites liés au poids (définis comme des préjugés conscients et intentionnels) ont été évalués en 2019 auprès de 33 948 adultes français participant à l’étude NutriNet-Santé. Parmi eux, 24 % étaient en surpoids et 11 % en situation d’obésité, soit un total de 35 % en situation de surpoids ou d’obésité. Les données ont été redressées sur le sexe, l’âge, la catégorie socioprofessionnelle, le niveau d’éducation et la zone résidentielle pour optimiser la représentativité de l’échantillon par rapport à la population française. Les préjugés liés au poids ont été évalués à l’aide du questionnaire Anti-Fat Attitude Questionnaire sur trois dimensions : l’antipathie envers les personnes en situation d’obésité (ex. : « Si j’étais un employeur, j’éviterais peut-être d’embaucher une personne en surpoids »), la préoccupation excessive vis-à-vis du poids (ex. : « Une des pires choses qui pourrait m’arriver serait de prendre 10 kg », et l’accord avec l’idée selon laquelle l’obésité est liée à un manque de volonté (ex. : « Certaines personnes sont en surpoids parce qu’elles n’ont pas de volonté »). Plusieurs résultats ressortent des analyses réalisées par les scientifiques.
• Les scores d’antipathie vis-à-vis des personnes en situation d’obésité étaient faibles, avec 9 % des participants (12 % des hommes et 6 % des femmes) qui présentaient des préjugés négatifs sur ce point. Il n’est toutefois pas exclu que les préjugés réels soient plus répandus et qu’un potentiel biais de désirabilité sociale ait pu entraîner une sous-déclaration.
• La préoccupation excessive vis-à-vis du poids était le préjugé le plus répandu, avec 55 % des participants (62 % des femmes et 47 % des hommes) présentant des scores élevés. Les scores étaient plus élevés chez les personnes en situation d’obésité et chez les étudiants, aussi bien chez les femmes que chez les hommes. Le questionnaire utilisé n’a pas permis de savoir s’il s’agissait d’une préoccupation vis-à-vis de son poids pour préserver sa santé ou pour satisfaire des critères de beauté et de minceur. D’autres études seront nécessaires pour mieux comprendre l’origine de cette préoccupation.
• En ce qui concerne le préjugé portant sur le « manque de volonté », 45 % des personnes interrogées (38 % des femmes, 54 % des hommes) présentaient des scores élevés témoignant d’une adhésion à l’idée que l’obésité est due à un manque de volonté. Les personnes en situation d’obésité présentaient des scores plus faibles, mais non nuls, ce qui suggère une internalisation de ces préjugés par les personnes qui souffrent d’obésité. Un niveau d’étude plus faible était également associé à des scores plus élevés, suggérant un rôle de l’éducation pour limiter les préjugés liés au poids.
Ces résultats mettent notamment l’accent sur la nécessité de mettre en place des mesures susceptibles de changer le regard de la société sur l’obésité et les personnes qui en souffrent.
Ces travaux ont été réalisés par un consortium de chercheurs de l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (Eren) de l’Université Sorbonne Paris Nord et Université Paris Cité, Inserm, Inrae, Cnam, Centre de recherche en épidemiologie et statistiques (Cress) et des services de nutrition de l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière et de l’Hôpital européen Georges Pompidou (AP-HP).
MC d’après le communiqué de l’Université la Sorbonne Paris Nord, l’Inserm, l’Inrae, le Cnam, l’Université Paris Cité et du Crees du 28 mars 2023.